FOCUS SUR LA CONVENTION FISCALE ENTRE LA FRANCE ET LES ÉMIRATS ARABES UNIS – SES IMPACTS POUR LES PERSONNES RÉSIDENTES AUX ÉMIRATS ARABES UNIS

La convention fiscale entre le gouvernement français et le gouvernement des Émirats arabes unis a été signée le 19 juillet 1989 et a été modifiée en 1993 pour inclure aujourd'hui également une convention multilatérale visant à prévenir l'érosion de la base d'imposition depuis son entrée en vigueur le 1er janvier 1993.1, 2019 (le "Convention").

Les objectifs de cette Convention sont multiples.

Tout d’abord, les deux pays souhaitent promouvoir leurs relations économiques et leur coopération en matière fiscale.

En outre, ils souhaitent éliminer la double imposition en ce qui concerne certains impôts spécifiquement couverts par la Convention.[1].

La Convention prévoit toutefois une réserve : les dispositifs ou stratégies mis en place par les contribuables, qu’ils soient personnes physiques ou morales, ne doivent pas avoir pour seul but d’obtenir un allègement fiscal au titre de la Convention.

Les impôts français et émiratis concernés par la Convention sont limités à [2]:

  • l'impôt sur le revenu, y compris en cas de vente d'un bien immobilier ;
  • impôt sur les sociétés immatriculées en France ou aux EAU ;
  • l'impôt de solidarité sur la fortune immobilière ; et
  • impôt sur les successions.

La notion de résidence fiscale : quels sont les critères ?

La notion essentielle de cette Convention, comme de toute convention fiscale, est celle de résidence fiscale.

La France fonctionne sur la base d'un ensemble d'indicateurs concernant la résidence fiscale d'un citoyen français[3].

Ainsi, vous serez domicilié fiscalement en France si :

  • votre domicile familial reste en France (conjoints/enfants) ; ou
  • si une personne exerce une activité professionnelle non accessoire en France, que ce soit en tant que salarié ou non ; ou
  • vous avez en France le centre de vos intérêts économiques (investissement de toute nature, siège social d'une entreprise, maison mère) c'est à dire que c'est en France que vous tirez l'essentiel de vos revenus (en comparaison avec les Emirats).

Et en cas de double résidence ? 

Toutefois, si vous résidez aux Émirats arabes unis pendant plus de 183 jours avec un visa de résidence, vous êtes également résident fiscal des Émirats, alors la Convention est d'une grande importance pour déterminer de quel pays vous dépendez à des fins fiscales.

La convention prévoit qu'en cas de double résidence fiscale, il faudra se référer à[4]:

  • le domicile permanent du contribuable;
  • si ce dernier possède deux domiciles habituels, il faudra alors tenir compte de ses intérêts vitaux (liens personnels et économiques les plus prononcés) ;
  • si ce dernier n'a pas de résidence et ne séjourne pas habituellement dans l'un ou l'autre pays, la résidence fiscale sera celle de sa nationalité.

Pour rappel, la notion de résidence fiscale est très importante car, si les autorités françaises considèrent que vous êtes résident fiscal en France alors tous les revenus et bénéfices qui proviennent des Emirats seront imposables en France.

Cet article vous aidera donc à faire la lumière sur la Convention fiscale si vous êtes citoyen français avec une résidence fiscale aux EAU.



revenus immobiliers français[5]

La Convention prévoit que les revenus immobiliers sont imposés respectivement dans le pays où le bien est situé.

Ainsi, même si, en raison des critères mentionnés, vous êtes résident fiscal aux Émirats, les revenus provenant de biens immobiliers situés en France seront imposables en France. Ainsi, même si vous détenez des actions de sociétés immobilières et non un bien immobilier, tant que la possession de ces actions vous confère l'usage du bien, vous serez alors imposé en France.

En revanche, si les actions d'une société immobilière ne vous donnent pas le droit de disposer du bien, ces revenus ne seront pas considérés comme des revenus immobiliers et seront imposés comme des revenus de valeurs mobilières.

Dividendes[6]

Si vous avez investi dans des actions/titres financiers de sociétés françaises et que vous percevez des dividendes alors ces revenus ne seront pas imposables en France mais aux Emirats et seront donc par définition exonérés d'impôts.

Il existe encore une exception qui se retrouvera pour tous les types de revenus traités par la Convention : si ces dividendes sont liés à une activité professionnelle exercée en France (profession industrielle, commerciale ou même indépendante) alors dans ce cas, les impôts sur ces dividendes seront payables en France.

Intérêt[7]

Si vous êtes résident fiscal aux Emirats et que vous percevez des intérêts sur des dettes françaises, vous êtes imposé sur ces revenus aux Emirats et vous en êtes ensuite exonéré comme les dividendes.

Ainsi, si les revenus issus de créances françaises sont liés à une activité professionnelle en France alors cette dernière sera imposable en France.

Redevance[8]

Toute rémunération résultant d'un droit de propriété intellectuelle et/ou industrielle (par exemple (droits d'auteur, brevets, marques, procédés de fabrication, codage informatique, etc.) seront payés dans le pays de résidence du bénéficiaire.

Ainsi, si vous êtes résident fiscal aux Emirats et que vous percevez une rémunération issue de royalties, vous ne paierez aucun impôt en France à une exception près : si ces royalties proviennent d’une activité professionnelle exercée en France par l’intermédiaire d’un établissement stable.

Plus-values [9]

Si vous êtes résident aux Emirats mais que vous vendez un bien non lié à une activité professionnelle ou si vous vendez des actions dont l'actif est composé de plus de 80% biens immobiliers en France, vous serez alors redevable de l'impôt sur les plus-values françaises.

En revanche, si vous vendez des titres, ces gains ne seront imposables qu'aux EAU, sauf s'ils sont liés à l'une de vos activités professionnelles en France.

Toutefois, en ce qui concerne les valeurs mobilières, il existe une exception : si les actions cédées représentent au moins 25% du capital d'une société française alors l'impôt sur la plus-value de ces actions sera payable en France.

Travailleur indépendant [10]

Si vous êtes résident fiscal aux Emirats mais que vous continuez à exercer une profession libérale en France, vous continuerez à payer des impôts sur les revenus issus de cette activité.

En revanche, si vous exercez votre activité indépendante par l’intermédiaire d’une base fixe ou d’un établissement stable aux Emirats alors ces revenus seront exonérés d’impôt en France.

Revenus des salariés [11]

Si vous êtes résident fiscal aux EAU et que vous percevez des revenus provenant d'un emploi rémunéré dans ce pays, vous êtes exonéré de l'impôt français.

Il existe toujours une exception : si vous êtes employé par une société émiratie mais que vous travaillez physiquement en France, les autorités françaises se réservent le droit de vous imposer sur les revenus provenant de sources émiraties, à moins que les trois conditions suivantes ne soient cumulativement remplies :

  • vous séjournez en France moins de 183 jours au cours de l'année fiscale concernée ; et
  • votre employeur n'est pas un résident français ; et
  • la charge des rémunérations n'est pas supportée en France (via un établissement stable par exemple)

retraite du secteur privé français  [12]

Concernant les pensions et rémunérations versées au titre d'une activité salariée antérieure au changement de résidence fiscale en France (hors activité dans la fonction publique), elles sont en principe non imposables en France.

Toutefois, les pensions versées au titre de la législation sur la sécurité sociale en France sont imposables en France, ce qui est le cas par exemple de l'assurance volontaire contre le risque vieillesse.

Impôt sur la fortune immobilière[13]

Si vous êtes résident fiscal aux EAU et que vous possédez un bien immobilier non lié à une activité professionnelle en France, dont le montant vous rend redevable de l'impôt sur la fortune en France, mais que vous devrez le payer si et seulement si la valeur de votre bien immobilier français est supérieure à :

  • la valeur des actions françaises cotées en bourse ou d'une société d'investissement agréée (couvrant tous les établissements de crédit, y compris les banques françaises non cotées en bourse)[14]; et
  • la valeur des créances françaises (envers l'Etat ou les entreprises) que vous détenez.

Ces actions et créances doivent également être détenues pendant plus de six mois pour permettre une telle exonération de l'impôt sur la fortune immobilière.

Héritage[15] 

Concernant la succession de biens immobiliers, quelle que soit votre résidence fiscale, celle-ci sera imposable dans l'Etat où se situe le bien.

S'agissant des titres liés à une activité professionnelle au sein d'un Etat, ceux-ci seront rattachés à la loi de succession de cette activité.

Enfin, concernant les autres titres sous réserve de dispositions testamentaires contraires, les biens seront imposés dans l'Etat dont le défunt était résident au moment de son décès.

Échange d'informations [16]

Les deux États se sont engagés à échanger des renseignements qui ne se limitent pas aux impôts visés par la Convention.





[1]Il faut alors comprendre a contrario que les impôts non visés par la Convention doivent être payés conjointement en France et aux Emirats.

[2]Article 2 de la Convention

[3]Articles 4 A et 4 B du Code général des impôts

[4]Article 4 de la Convention

[5]Article 5 de la Convention

[6]Article 8 de la Convention

[7] Article 9 de la Convention

[8] Article 10 de la Convention

[9] Article 11 de la Convention

[10] Article 12 de la Convention

[11] Article 13 de la Convention

[12] Article 14 de la Convention

[13] Article 16 A de la Convention

[14] BOI-INT-CVB-ARE, 12 sept. 2012, § 20.

[15] Article 17 de la Convention

[16] Article 21 A de la Convention

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